Ou : « C’est en faisant ses cartons qu’on s’inquiète… » 😉
Petit ressenti personnel d’Olivier à J-19 avant le départ
Strasbourg, nuit du 15 au 16 février 2020.
Arrive un moment, la date du départ approche. Et le projet auquel on pense depuis des mois n’évite pas la case du : « mais, au fond, pourquoi ? ». Alors que je posais la question à un collègue (devenu un ami), sa réponse fut immédiate : « pour profiter », me dit-il. C’est évident. Mais au fond, il s’agit surtout de se forcer à sortir de cette fameuse « zone de confort ». Celle dans laquelle l’on s’installe lorsqu’on a à nouveau son appartement, celle dans laquelle on s’installe lorsque ses amis et sa famille sont à proximité, celle dans laquelle on s’installe lorsqu’on a un emploi dont on se satisfait, fusse-t-il saisonnier (et mal payé, mais quand on se marre, on compte moins ^^).
Il y a un peu plus de 3 ans, lors du précédent voyage « PVT en poche » en Nouvelle-Zélande, la situation était différente : fin de CDD d’un job sans intérêt qui avait viré progressivement à la mascarade, fin logique prévue 3 ans auparavant, le risque de partir était pour ainsi dire inexistant. Au contraire, il était nécessaire pour remettre les choses à plat, et s’est même révélé salvateur.
10 mois après, le 29 juillet 2017, à 2 jours du retour de Nouvelle-Zélande, j’avais griffonné ceci au fond d’un carnet :
Avant-dernier nuitée en Aotearoa New Zealand.
L’heure du retour ?
L’heure d’un nouveau départ, l’heure de nouveaux choix.
Le choix de retrouver le « confort » du quotidien : logement fixe, gagner sa vie, retrouver ses habitudes…
Ou le choix d’autre chose.
Le choix de l’inconnu, du renouvellement perpétuel.
On dit qu’un voyage au long court vous change. On ne se sent pourtant pas changer.
Mais, indéniablement, c’est vrai. On est différent. Oh, pas radicalement : on a toujours ses opinions, ses points de vue. Mais on n’a plus les mêmes repères. Plus les mêmes règles. Plus les mêmes critères de réussite.
(…)
Dernière nuit -ou presque. Mais ce n’est qu’un nombre. Ce qui vient vraiment, maintenant, c’est le choix entre un nouveau départ, une suite, au renouveau, ou à un simple recommencement.
Le sort en décidera. Mais le sort n’existe pas. Les dés sont jetés, mais il n’y a pas de dés.
« Conceptuellement », aurais-je dit avant.
Relativement, dirais-je maintenant.
Parce que rien n’est jamais tracé.
Et qu’on est seulement tous des citoyens du monde.
O. »
Ce que je retiens en relisant ces lignes, ce sont ces termes de choix, de confort, de repères, mais aussi de renouvellement perpétuel. Et c’est ce dernier qui manquait, sans doute. Que dirais-je en rentrant, après « conceptuellement » puis « relativement » ? On verra bien.
Ce que je sais, c’est qu’alors, dès le retour, l’envie de repartir était bien présente. L’Argentine, déjà, était sur la liste, mais plutôt, il faut bien le dire, par défaut. Le Chili, alors socialement considéré comme stable, nous attirait davantage.
Le retour, au début, ça n’avait pas été si facile. On vit la tête ailleurs. Mais, au fur-et-à-mesure, on s’y fait. On tente des choses, on fait des projets de moyen terme. On goûte certains petits plaisirs, on vit aussi l’instant présent, mais toujours avec des projets ou des arrières-pensées.
Et puis, il y a eu ce passage du PVT à 35 ans pour l’Argentine. Le déclic qui fait que, dès lors, on y pense à nouveau. Au voyage. A la découverte. Au(x) changement(s). A la remise en question de soi et de son mode de vie. On a beau s’installer dans ses choix de vie, l’idée est imprégnée.
Ce soir, à un peu plus de 2 semaines du départ, je regarde l’appartement à moitié vide, avec des cartons dans les recoins, et je me dis que la situation de 2017 a changé. Mais, en fait, pas tant que ça. Car l’idéal de découverte est toujours là. Et qu’au fond, la zone de confort, c’est bien, mais les découvertes et les remises en question, c’est mieux : c’est vivre vraiment !
Alors, oui, ce soir, je stresse un peu de (re)partir. Mais je sais que ne pas partir, abandonner ce projet, aurait été un non-sens absolu, et un regret éternel (bien que je doute que ma vie soit éternelle, mais ça c’est une autre histoire).
Nous ne vivrons évidemment pas l’aventure au sens de James Cook (dont je viens au passage tout juste de finir la très bonne biographie rédigée par Anne Pons), isolé des siens durant de longs mois et à la merci des maladies. Nous ne vivrons pas l’aventure au sens des épopées en canoë, en kayak, à vélo, ou en randonnée à travers les Andes. On se sent petit à coté de ces gens qui font des tours du monde à vélo ou à pied en 5 ou 10 ans. Mais, à notre échelle, on abandonne quand même quelque chose, pour l’inconnu. Et c’est cette petite pointe de stress qui apparaît ce soir devant ces étagères vides, devant ces livres absents, devant ces petites choses qui nous ont donné notre cadre de vie ces 2 dernières années.
Reste à découvrir ce que ce voyage nous réserve…
Ce blog a failli s’appeler « CAP-austral » (Chili-Argentine-Pérou, facile ^^). Et bien, Cap 2020, cap vers l’incertitude !
Argentine, Amérique du Sud, nous voilà ! Je ne sais pas comment tu nous accueilleras, je ne sais pas combien de temps tu nous convaincras de rester, je ne sais pas en détail ce que tu vas nous montrer, je ne sais même pas si tu nous plairas… Et c’est pour ça qu’on vient.